1
Ce trait est souligné par Chardin : « Les Persans sont les peuples les plus civilisez
de l’ Orient, & les plus grands complimenteurs du monde. Les gens polis parmi eux peuvent aller du pair avec les
gens les plus polis de l’Europe. Leur air, leur contenance est
la mieux composée, douce
, grave, majestueuse
, affable, & caressante au possible » (t. IV, p. 108).
2
Écho de la Lettre 28 : « Comment peut-on être
Persan ? ».
3
L’expression ne désigne pas nécessairement un noble, à la différence d’
homme de qualité (voir note suivante) :
la considération est l’« Estime & […] la reputation, que
meritent les bonnes qualitez, ou que la dignité, & les charges
attirent. » (Académie, 1718).
4
« De qualité enchérit sur de condition ; car on se sert de cette derniere
expression dans l’ordre de la bourgeoisie, & l’on ne peut se servir
de l’autre que dans l’ordre de la noblesse. » (Gabriel Girard, Les Synonymes français, Paris, Veuve d’Houry,
1736, p. 104).
5
Depuis 1687 la totalité des revenus du roi était réunie sous ce qu’on
appelait la ferme générale, ou consortium
d’hommes de finance qui partageait le bail ou contrat de perception
passé avec la Couronne. Le parti des finances « est celui où la
fortune est toujours […] ample & […] avantageuse pour les richesses.
Elles ne sont pas gagnées, à ce qu’on dit, fort innocemment ; mais
donnant toute sorte de crédit & de pouvoir dans le Monde, leur faste
fait pardonner leur acquêt. » (Challe, Les
Illustres Françaises, t. II, p. 16
-17). Voir La Nouvelle École publique des
finances, ou l’art de voler sans ailes (1708), où Raymond,
fils de paysan, d’abord laquais, meurt fermier général, ou le portrait
du maltotier dans l’ Histoire véritable,
livre II, OC, t. 9, p. 141
). Cependant il s’agit plus d’un cliché, ou d’un type littéraire,
que d’une réalité : voir Lettre 95, notes 5 et 10. Le type du
« laquais-financier », « impossible, sinon
impensable » dans la réalité (Daniel Dessert, Argent, pouvoir et société au Grand siècle , Paris,
Fayard, 1984, p. 104), relève du mythe, illustré par
La Bruyère (Les Caractères, 11 e éd., 1714, Catalogue
, nº 660 ; édition utilisée ici : 9 e
édition, Paris, Estienne Michallet, 1716, p. 176-215) et Lesage (Turcaret
) ; sur l’ensemble de cette question, voir Daniel Dessert,
p. 98-107.
6
Souvenir de Cléon dans Le Misanthrope (II,
4) :
Célimène : […] c’est à sa table à qui l’on rend
visite.
Eliante : Il prend soin d’y servir des mets fort
délicats.
Célimène : Oui ; mais je voudrais bien qu’il ne
s’y servît pas :
C’est un fort méchant plat que sa sotte
personne,
Et qui gâte, à mon goût, tous les repas qu’il donne.
7
« Sot, ridicule, qui n’agit, ou qui ne parle pas selon la raison
[…] » (Trévoux , 1704).
8
Souvenir de Tartuffe : « Il a l’oreille
rouge et le teint bien fleuri » (I, 4).
9
« Confesseur ordinaire d’une personne » (Richelet, 1680, p.
245), ou plus spécifiquement un directeur de conscience.
Quelques années plus tard, Marivaux fera de la « femme à
directeur » un grand thème du Paysan parvenu
(1733-1734), mais La Bruyère l’avait déjà exploité
(« Des femmes », Les Caractères ,
p. 76-113).
10
Voir « De la nécessité d’avoir un Directeur pour entrer & pour
marcher dans les voyes de la Dévotion » dans François de Sales,
Introduction à la vie dévote ,
livre I, chap. iv (Paris, 1696,
p. 15
-19). C’est ce que recommandent les jésuites.
11
Régulières, réglementaires, ou prévues : Usbek parle des
« jeûnes marqués » des chrétiens (Lettre 33), analogues à ceux des
musulmans, et Rica de « l’heure marquée » pour son entretien
avec le bibliothécaire du couvent (Lettre 129).
12
Si c’est un poète en particulier qui est visé, il pourrait s’agir de
Louis Racine, dont La Grâce date de 1720
(Montesquieu notera d’ailleurs dans les Pensées,
nº 141, avec la date du 22 décembre 1722, « Le poëme de
Racine sur la grâce est ici infiniment admiré et meprisé ») ou de
Jean-Baptiste Rousseau, connu à l’époque pour ses odes et ses couplets
mordants, dont le même article des Pensées
évoque « le feu et le fiel ». Voir la critique du genre
poétique dans la Lettre 131
.
13
D’après le proverbe latin Fiunt oratores, nascuntur
poetae (on devient orateur, on naît poète).
14
Souvenir de la sagesse de Philinte dans Le Misanthrope
(I, 1) : « Je prends tout doucement les hommes comme ils
sont,/J’accoutume mon âme à souffrir ce qu’ils font. ».
15
La leçon de l’édition B n’est pas absurde (« Monter la
trenchée, c’est monter, ou descendre
la garde à la trenchée »,
Furetière, 1690, art. « Trenchée »), mais elle dénature le sens de la
phrase.
16
Pascal s’adresse à eux dans les Pensées ,
nº 80 (Catalogue , nº 415, 1678, p. 182-183).
17
Selon le Dictionnaire des institutions de
Marcel Marion, il existait des « officiers de fortune »,
d’origine roturière, qui pouvaient parvenir au grade de sous-lieutenant
ou de major, mais jamais à celui de capitaine ; ils devaient avoir
un rôle administratif, mais ne pas commander en campagne (Paris,
1923 ; reprint Paris, Picard, 1976 ; « Officiers de
fortune » ; voir aussi l’article « Grades »). Ainsi
cette distinction serait fondée en nature : seul l’aristocrate-né
aurait le don du commandement.
18
Doté ; partager « se dit aussi de la
nature, & des dons qu’elle fait aux uns & aux autres »
(Furetière, 1690. t. III).
19
Jean Frédéric Bernard dit à propos des petits-maîtres de l’époque :
« L’habillement de leur tête n’est pas moins singulier que celui
des femmes : la tête de l’homme du monde
est ensevelie dans un amas de cheveux tressés & bouclés ;
élevés demi-pied au dessus de front ; la forme en change au moins
toutes les années. Ces cheveux postiches sont d’un admirable
secours » (Réflexions morales ,
« Cinquième fragment du philosophe persan », p. 210). Cotolendi de même évoque la perruque des jeunes gens à
la mode « avec leurs plumes, & leurs perruques blondes »
(« Traduction d’une lettre italienne, écrite par un Sicilien à un
de ses amis », p. 418).
20
En donner à garder à quelqu’un :
« C’est à dire, en faire acroire, dire des bourdes & des contes
[…] » (Richelet, 1680, « Garder »).
21
Chez ce petit-maître, l’expression est sans doute un aveu de sa faiblesse
sexuelle. Le verbe est utilisé en ce sens dans l’ Histoire véritable ; après avoir été un fat
présomptueux, le narrateur dans sa vie suivante décide de faire la cour
aux femmes vieillies et riches : « [...] j’avois toujours eû
pour maxime de commencer par faire connoître ce que je valois. Je
n’ignorois pas que les femmes sont trop avares pour se ruiner avec de
certaines amans, et que si les hommes les quittent par caprice, elles ne
quittent guêre les hommes que par raison. » (Livre II ;
OC, t. 8, p. 145).
22
Voir le portrait (plus tardif) par Charles Duclos de « l’homme à
bonnes fortunes » : « Il n’y a point de profession, point
d’objets d’ambition ou de fortune, point de macerations religieuses qui
imposent autant de soins, d’embarras, de peines & d’inquiétudes que
la prétention d’être un homme à la mode. Tel s’y livre de dessein formé
qui, s’il y étoit condamné, se trouveroit le plus malheureux des
hommes. » (1751 ; Mémoires pour servir à
l’histoire des mœurs du xviii
e siècle , Paris, 1751, p.
138-139).
23
Souvenir du vers de Racine : « Le jour n’est pas plus pur que
le fond de mon cœur » (Phèdre, IV,
2) ?
24
La comparaison de la virginité avec l’état des anges, employée souvent
par les moralistes catholiques, provient de l’Évangile : « Car
après la résurrection, les hommes n’auront point de femmes, ni les
femmes de maris : mais ils seront comme les Anges de Dieu dans le
ciel. » (Matthieu, XXII, 30).