1
L’après-midi : au Théâtre Français les représentations ont lieu
l’après-midi à cinq heures et demie.
2
Le mot désigne proprement non la salle mais l’estrade où jouent les
comédiens : « […] se dit aujourd’huy de la Scêne, ou du lieu
ordinaire où l’on represente des Comedies, & des Tragedies. C’est
une grande salle dont une partie est occupée par le theatre ; le reste est un espace qu’on appelle parterre,
terminé d’ordinaire par un amphiteatre, avec des
loges à un ou deux étages dans le contour […] » (Furetière, 1701,
art. « Theatre »). Par contre, « scène » désigne ici
de manière ironique les loges.
3
Chardin parle de danseuses ou « mimes » qu’il compare aux
acteurs de théâtre en Europe (t. II, p. 247-248 et t. V, p. 230-231).
4
« Les manchons n’estoient autrefois que pour
les femmes ; aujourdhuy les hommes en portent. » (Furetière,
1690, art. « Manchon »). La coquille n’était donc pas absurde.
5
Il n’y avait pas de places assises au parterre de la Comédie.
6
La canne est à la mode, comme on peut le voir dans l’histoire de Dupuis
en 1713 : « Je laissai tomber mon chapeau, mes gands, mon
livre, & ma canne […] » (Challe, Les
Illustres Françaises , t. II, p. 463; cf. t. I, p. 387), et ci-dessous à la Lettre 80 où elle figure de même à côté de l’habit
brodé, de la perruque, de la tabatière et des gants.
7
Il s’agit soit de l’un des deux foyers qui se trouvait derrière le
théâtre rue des Fossés-Saint-Germain, soit des loges des actrices.
8
Souvenir de l’embarrassante familiarité manifestée par Oronte dans Le Misanthrope (I, 2) ? Mais ces
démonstrations excessives semblent caractériser le monde des
petits-maîtres : cf. Lesage, Gil Blas de
Santillane (1715), livre III, chap. III et VI
.
9
Il faut sans doute comprendre : elles sont hautaines le temps de la
représentation, quand elles jouent les reines et les princesses, et
courtisanes le reste du temps.
10
Le sens érotique de l’expression est bien attesté. Montesquieu ne
développe pas ce qui chez Rousseau (Julie ou la
Nouvelle Héloïse, II e partie,
Lettre 26) et Voltaire (Candide ,
XXII) fera l’objet d’une réflexion morale ou plaisante.
11
La danseuse pourrait faire partie de la troupe de prêtresses qui
dansent dans la tragédie lyrique Iphigénie en
Tauride , musique de Desmarest et Campra, paroles de
Duché de Vancy et Danchet (Recueil des opéras
représentés par l’Académie royale de musique, Amsterdam,
1708, tome X) : l’illustration montre une femme en habit blanc
avec voile (p. 61 ; voir aussi ci-après, note 13).
Elle fut représentée avec grand succès en 1704 (trente-trois
représentations), et rejouée en 1711, 1719 et 1734. Le rôle
d’Iphigénie, grande prêtresse de Diane, avait été créé par M lle Journet, dont les activités galantes sont
abondamment attestées. Mais le contraste entre les rôles des
comédiennes et leurs mœurs est un lieu commun du roman : voir
Lesage, Le Diable boiteux (1707),
chap. xii, p. 196.
12
Voir la remarque de Bayle : « Encore y en a-t-il [des
abbés] qui ne se contraignent guere, car par exemple qu’y a-t-il de
plus galant & de plus coquet que cette multitude d’Abbez dont la
ville de Paris abonde, qui vont aussi à découvert à l’attaque d’une
femme, que sauroient faire les jeunes Marquis ? » (Critique du P. Maimbourg,
Lettre IX, 2 e édition, Ville-Franche,
Pierre le Blanc, 1683, p 161) « Je n’ai jamais vû tant d’Abbez, & qui
portent plus volontiers l’habit court, le petit colet, & la
perruque blonde. En verité ils sont l’ornement de Paris, & le
refuge des Dames affligées ; comme ils ont l’esprit galant,
leur conversation est plus agréable, & plus souhaitée, j’ai
trouvé parmi eux les personnes les plus obligeantes, les plus
civiles & les plus secretes. Il seroit à souhaiter que le grand
nombre d’Abbez fût diminué, en retranchant de ce rang honorable tous
ceux qui ont leurs Abbayes dans le concave de la Lune, & dans
les espaces imaginaires. » (Charles Cotolendi,
« Traduction d’une lettre italienne, écrite par un Sicilien à
un de ses amis », p. 419).
13
Le bandeau virginal, comme le voile et l’habit blanc, fait partie de
son costume d’opéra : les vestales, dit Bernard de Montfaucon,
« portoient les cheveux liez d’un ruban », et les
prêtresses étaient voilées de différentes manières (L’Antiquité expliquée, 1719, t. II,
p. 32, 41-42).
14
Selon Ivor Guest, « la direction de l’Opéra estimait nécessaire
de placer des sentinelles dans les couloirs qui conduisaient aux
loges, pour protéger les artistes des entreprises de jeunes
aristocrates et abbés galants en quête d’aventures amoureuses »
(Le Ballet de l’Opéra de Paris, Paris,
Flammarion, 1976, p. 21).
15
Le 13 janvier 1713, Louis XIV imposa un règlement qui fixait le
nombre des artistes de l’Opéra et leurs appointements : il y
aurait deux danseuses à neuf cents livres chacune, quatre à cinq
cents livres et quatre à quatre cents (Louis Travenol, Histoire du théâtre de l’Académie royale de
musique en France, Paris, 1757, t. I, p. 120),
soit un peu plus qu’un curé à portion congrue (300 livres). Voir
aussi Jean Sgard, « L’Échelle des revenus », Dix-huitième siècle nº 14, 1982,
p. 425-433 : de trois cents à mille livres par an, on
trouve les « ouvriers spécialisés […] enseignants de
collège » (p. 426) – autrement dit, ces revenus sont
insuffisants pour mener grand train, quand il faut six mille livres
à Des Grieux et Manon Lescaut pour mener une vie « honnête mais
simple » (p. 429).
16
Chardin observe qu’en Perse les danseuses étaient des femmes
publiques (t. II, p. 247-253) : « […] en Orient
la Danse est deshonnête, ou infame, si
vous voulez, & il n’y a que les femmes publiques qui dansent
[…] » (t. IV, p. 140 ; voir p. 194). Elles pouvaient néanmoins être fort bien payées à
la cour et comblées de présents ; il assure avoir vu en
Hyrcanie « un soir à la Cour deux de ces Danseuses, qui avoient
chacune pour plus de dix mille écus de pierreries sur elles »
(t. II, p. 251-254).